Des résultats encourageants. Le taux de feux de brousse dans l’Aire protégée (AP) Bemanevika a baissé depuis quelques années.
Les communautés de bases (COBA) déclarent également qu’il n’y a plus d’exploitation illicite des bois. Ces résultats sont les fruits des efforts déployés par les COBA, le gestionnaire de l’AP, les techniciens, les chercheurs, les agents forestiers, le ministère de l’environnement, les autorités locales. Conscients de l’importance de la biodiversité, les communautés se sont engagées à participer activement à la conservation de cette dernière. L’AP est situé à 40 km environs au Nord-ouest de la ville de Bealanana. Il est accessible en voiture tout-terrain 4×4, moto cross, tracteur sauf pendant la saison de pluie durant laquelle le site est presque isolé. Avec une superficie 35.605 ha, l’AP est classée dans la catégorie 5, Paysage Harmonieux Protegé (PHP) dont le noyau dur, la ZOC, la ZUD ainsi que la zone de culture sont délimités. Gérée par l’ONG Peregrine Fund Madagascar (TPF), le PHP abrite 20.000 habitants, répartis dans 7 fokontany. Afin de responsabiliser les communautés locales dans la conservation de la biodiversité, TPF a conclu un contrat de transfert de gestion de ressources naturelles. Quatre COBA travaillent en étroite collaboration avec le gestionnaire de l’AP, les agents forestiers, la direction de l’environnement et du développement durable. Ils se répartissent dans 4 zones, notamment Amberivery, Sandrakotra, Marofamara ary Ambinanindrano. Il s’agit de l’association FIMAKA (Fikambanana Miaro ny Ala-Ketsan’Amberivery), AMTI ( Ambinanindrano Miaro Tontolo Iainana), FIMAM ( Fikambanan Miaro Aty Ala Marofamara).
Les bonnes pratiques de gestion de l’AP
Les COBA réunissent la communauté et l’expliquent l’importance de la biodiversité et sa conservation. Pendant l’été, elles sensibilisent les habitants d’être vigilant aux feux de brousse. Si une personne veut couper un arbre pour construire une maison ou clôture, elle doit demander une autorisation au Président de la COBA. Il est difficile de saisir les auteurs des brousses parce que l’AP est au bord de la route, selon Angarine, Président de la VOI FMAM en expliquant le défi qu’il fait face à la conservation de l’AP. Heureusement, il a dit qu’il n’y plus de coupe illégale de bois parce que la population respecte le « Dina » et la patrouille est renforcée. L’élevage bovin est l’une des activités de la population de Bemanevika. Elle pratique les feux de brousse pour avoir de zone de pâturages. Les VOI et TPF ont mis en place de pare-feu, une solution efficace pour maîtriser le feu/éviter l’évasion de feu. Par ailleurs, chaque COBA a également la façon de conserver l’AP, selon la charte communautaire traditionnelle (dina). Par exemple, la coupe illicite de bois risque de payer une amende de 50.000 Ariary à 300.000 Ariary par hectare de forêts brûlées. Les habitants doivent demander l’autorisation de la VOI s’ils vont brûler un terrain déterminé à usage de culture mais ils seront sanctionnés si la surface brûlée dépasse à celle qui était demandée.
Les impacts de la conservation de l’AP Bemanevika
La population de Bemanevika est convaincue que l’approvisionnement en eau dépend des forêts. Les blocs et fragments forestiers restants de l’AP constitue un réservoir d’eau pour les bassins versants environnants et alimentent les principaux cours d’eau de la région tels que la rivière Sandrakota avec ses affluents qui sont principalement Morapitsaka, Ampatika, Ambongamarina, Sarotraboaka, Bekavahy Sud et Sandrakotahely ; les rivières Ambatomainty et Amberivery qui s’affluent à Maevarano; et la rivière Beandrarezona qui débouche à Bealanana. » Les jeunes plants poussent bien et les arbres se multiplient lorsqu’on protège le noyau dur. Désormais, le volume d’eau augmente. Avant, l’eau était insuffisante ou tarissait pendant l’été. Auparavant, la saison de pluie arrivait tard. Maintenant, la pluie tombe tôt, plus précisément le mois d’août. Les habitants peuvent ainsi cultiver de riz et de maïs pendant l’été », a déclaré Naivo, Président de l’Association FIMAKA. 
Il affirme aussi que les habitants s’engagent à protéger le noyau dur parce que des projets de développement ont été déployés dans leur quartier, à savoir la mise en place des activités génératrices de revenus, la distribution de semence, la dotation des kits solaires pour favoriser l’accès à l’énergie, la construction des infrastructures (école, puits, barrage). Le TPF fournit également des équipements en faveur des VOI pour la patrouille et surveillance. Les VOI effectuent chaque mois des rapports et les envoient au responsable de la commune, du TPF, du cantonnement. Parfois, elles baissent le bras faute de moyen. « Je les encourage en disant c’est pour le bien de tous et de notre génération future », indique Naivo. Il demande ainsi d’offrir plus d’équipements, tels que des imperméables, bottes de patrouille, lampes de poche.
Les spécificités de Bemanevika
L’aire protégée Bemanevika présente également l’unique endroit de Madagascar ayant quatre habitats majeurs, notamment l’écosystème forestier, l’écosystème lacustre, l’écosystème marécageux et l’écosystème savane. En effet, le site constitue un refuge de beaucoup d’espèces endémiques en danger telles que l’oiseau d’eau fuligule de Madagascar Aythya innotata, le hibou rouge Tyto soumagei, l’aigle serpentaire Eutriorchis astur, l’oiseau de marais et marécage busard de Madagascar Circus macrosceles, le batracien Scaphiophryne boribory, les espèces de lémuriens, le caméléon Calumma hafahafa… Etant classé critiquement en danger par l’UICN, le filugul de Madagascr, appelé aussi « onjy » ou « fotsimaso » est l’un des oiseaux les plus rares et les plus en dangers à l’échelle national. La dernière observation de cette espèce remonte à une vingtaine d’année, au lac Alaotra.
Vive l’espoir, les chercheurs de The Peregrine Fund ont fait la découverts de neuf individus adultes et quatre canetons sur le lac Matsaborimena, à Bemanevika du district de Bealanana, région Sofia en 2006. Ce site regorge également beaucoup de faunes et flores endémiques. 180 espèces de plantes forestières peuvent être rencontrées dans la forêt de Bemanevika. Parmi les espèces inventoriées, 83,10% des espèces sont endémiques. Ce taux d’endémicité élevé témoigne l’originalité des forêts de Bemanevika. D’après la recherche, une plante médicinale dédiée au traitement de la maladie de prostate a été découverte, selon Andriamalala Tolonjanahary, biologiste et ornithologue. Les chercheurs continuent encore de découvrir les espèces endémiques. Les scientifiques et les agents de terrain de TPF font également un suivi écologique scientifique des oiseaux d’eau, lémuriens deux fois par an. Un programme d’élevage en captivité des fuligules de Madagascar a été réalisé pour les multiplier.
Dans le domaine du tourisme, une vingtaine de groupe de touristes visitent chaque année l’AP Bemanevika pour découvrir les oiseaux endémiques. Pour terminer, l’AP est classée comme un site culturel et site sacré, à savoir le lac Maramarantsalegy, ainsi que la savane et les forêts qui se trouvent aux alentours. Le lac Maramarantsalegy est un lieu de culte traditionnel sacré pour la communauté d’Ambinanindrano. L’évènement a lieu chaque année entre juillet et octobre. Il a pour objet de demander la bénédiction de Dieu et une profession de vœux. Pour la forêt d’Ambatofitatra, il s’agit d’un lieu où les habitants d’Ambinanindrano se réfugiaient lors de l’époque de Menalamba. Le nom est issu de la couleur du rocher.
Ra-Nirina
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